« C’est la loi de l’amour qui gouverne l’humanité. Si la violence, c’est à dire la haine, l’avait gouvernée, elle aurait depuis longtemps disparu. » (Mohandas Gandhi, 13 avril 1940).
Sur la base de cette citation, il convient de s’interroger sur les points suivants :
N’est-il pas temps de mettre fin au problème turco-arménien ?
Combien d’années encore faut-il attendre pour trouver une solution à cette question vécu déjà depuis presque un siècle, et par plusieurs générations ?
Faut-il attendre encore un deuxième siècle pour résoudre ce conflit historique ?!
Il faut absolument multiplier les efforts pour mettre un terme aux conséquences d’un génocide perpétré depuis presque 100 ans !
Ne pas apporter un dénouement à la ‘question arménienne’, surtout après tout ce développement que l’humanité a vécu sur toutes les niveaux de la vie sociale, notamment au niveau du respect des droits de l’homme, reflète incontestablement un caractère indigne.
Le génocide des Arméniens révèle-t-il l’impuissance du droit, autrement dit l’inféodation du droit à la force, à la politique, aux enjeux géostratégiques ?
Est-ce que la preuve que le droit, et plus particulièrement le droit international, est structurellement faible et ineffectif ?
Le génocide des Arméniens, premier génocide moderne, n’a jamais été sanctionné et n’est toujours pas reconnu par la Turquie. Qu’a fait le droit ?
Le jugement de l’Histoire est sévère. Rien, le droit n’a rien fait en 1915 ni pour prévenir, empêcher et ensuite sanctionner les actes criminels commis à l’encontre des Arméniens ottomans. Doit-on pour autant conclure que le droit est inapte à intervenir efficacement lorsqu’un génocide est commis ? Le génocide perpétré durant la Seconde Guerre mondiale envers les Juifs, les génocides les plus récents en Bosnie et au Rwanda, inciteraient fortement à une réponse positive. Le génocide serait ainsi un crime que l’on ne peut pas punir pour reprendre les mots de Hannah Arendt. Un crime que l’on ne peut pas prévenir également.
L’idée d’une justice pénale internationale ne serait-elle qu’un fantasme, une aspiration à la fois légitime et naïve, propre à une scène internationale contemporaine à la recherche d’un nouvel ordre global qui tarde à se faire sentir ?
Indiscutablement, les considérations politiques ont dominé les exigences du droit. Toutefois, la naïveté doit être exilée. La politique en général et la diplomatie en particulier reposent sur de froids calculs d’intérêts. La prise en compte de valeurs morales n’est pas le guide principal de l’action politique. Les États n’agissent qu’en fonction de leurs intérêts égoïstes. Le système juridique éprouve d’énormes difficultés à sanctionner les crimes contre l’humanité. L’absence de sanction du génocide des Arméniens s’explique de manière historique, notamment parce que la notion de crime contre l’humanité balbutiait encore à l’époque. L’inefficacité des normes internationales sur le génocide serait sans doute due au manque de volonté des États qui entendent préserver leur souveraineté et défendre leurs intérêts nationaux.
Le droit ne serait alors une réponse efficace aux conflits humains qu’en temps normal mais il deviendrait impuissant face à la barbarie généralisée, lorsque la barrière de l’inhumanité est franchie. Le droit international pénal serait une matière condamnée à l’inefficacité.
Cette vision pessimiste du droit, si elle correspond à une part de réalité, doit cependant laisser une place à une acception du droit porteuse d’espoir et de progrès, et il est nécessaire malgré tout de continuer à croire à la justice internationale, au principe d’égalité, aux libertés et aux droits de l’homme, conçues par la communauté internationale.
Rodney Dakessian
Beyrouth le 8-Aout-2013