Reconnaissance internationale: La déclaration des Alliés du 24 mai 1915

 

La déclaration des Alliés du 24 mai 1915 montre que la responsabilité d’un État pour un crime contre l’humanité ou un crime de génocide et les réparations dues, ainsi que l’obligation de rembourser les biens confisqués, existaient au moment de la perpétration des massacres Arméniens.

En effet, cette déclaration est considérée comme faisant partie des pièces officielles publiées au cours de la 1re Guerre mondiale. Dès le mois de mai 1915, les ambassades allemande et américaine se trouvent informées jour par jour de l’évolution des déportations qui se déroulaient dans chaque vilayet de l’Empire ottoman. Déjà, le 22 avril, avant les arrestations à Constantinople, le catholicos arménien, Guevorg, qui vit à Etchmiadzin, en Arménie russe, s’était adressé au Président des États-Unis et au roi d’Italie, Victor-Emmanuel, et sa démarche avait été appuyée par les ambassadeurs de Russie à Washington et à Rome. Le 6 mai, le catholicos téléphone à Poincaré pour lui faire part de ses inquiétudes.

Depuis le 27 avril, le ministre des Affaires étrangères russe, Sazonov, prépare une note de protestation des puissances de l’Entente. Elle n’est rédigée et publiée par l’agence Havas que le 24 mai :

« Les gouvernements de France, d’Angleterre et de Russie ont décidé en commun accord de faire les déclarations suivantes :

Depuis un mois, les populations turque et kurde, de concert avec les agents du gouvernement turc, et souvent avec leur aide, sont en train de massacrer les Arméniens. En particulier, des massacres ont eu lieu vers la mi-avril, à Erzeroum, Terdjan, Bitlis, Mouch, Sassoun, Zeïtoun et dans toute la Cilicie.

Dans les environs de Van, la population de plus de cent villages a été massacrée en masse. Le gouvernement turc est aussi en train de persécuter la population arménienne inoffensive de la capitale. Devant ce nouveau crime de lèse-humanité perpétré par les Turcs, les puissances de l’Entente déclarent publiquement à la Sublime Porte qu’elles en tiendront personnellement responsables les membres du gouvernement ainsi que tous ceux qui auront participé à ces massacres. »

Si le crime contre l’humanité est entré dans le droit positif en 1945 au procès de Nuremberg, il faut remonter à la déclaration des Alliés du 24 mai 1915 adressée à l’Empire ottoman qui dénonçait « les crimes contre l’humanité et la civilisation » commis à l’encontre des Arméniens pour en saisir l’origine.

La valeur de cette déclaration réside dans le fait que la responsabilité de l’État pour un crime contre l’humanité ou un crime de génocide existait au moment de la perpétration des massacres.

Et même dans l’absence de la mention du « crime de génocide » dans certains cas précédents l’année 1948, cela ne signifie point qu’il ne constituait pas un des crimes connus en droit international, mais il faisait partie intégrante des crimes contre l’humanité.

 

Rodney Dakessian

Beyrouth le 26-Septembre-2013

 
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